FLEUVES IMAGINAIRES…
Amou
Daria
Iénissei / Iguaçu
Enfant,
j’avais une vraie passion pour l’histoire
géographie. Sans doute parce qu’habitant dans un
petit village agricole du sud de l’Oise, ma
géographie était exiguë, le village et les champs
environnant étaient vite traversés lorsque nous jouions aux
cowboys et aux indiens. A l’école, je
m’investissais à fond dans l’histoire et la
géographie, la lecture des pages ,après les pages roses du
dictionnaire, était l’occasion de découvrir des
choses étonnantes et des personnages que nous avons tous
oublié maintenant. J’ai récupéré un vieux
dictionnaire qui datait des années vingt ! il y avait
des illustrations, toutes petites, des dessins au trait qui
frappaient l’imagination. J’avais également un
ensemble de cartes des cinq continents qui constituaient
une bande pliante en carton et je pouvais le poser en
triangle en trois dimensions sur mon bureau. Le plus
délicat était de choisir quel continent serait à
l’honneur. L’examen de ces éléments me prenait
beaucoup de temps. En plus arrivait à la maison Paris Match
et Sélection du Reader Digest , sans oublier les
livres scolaires. Enfin cerise sur le gâteau, le Père Noël
m’a apporté un Atlas tout neuf, en couleurs et avec
des photos ! Là les voyages sur les cartes avaient de
la gueule, on pouvait passer du Zambèze au Nil, de
l’Amazone au Parana, du Mississipi au Rio grande, Du
Danube au Po et du Gange au fleuve Amour ! Magique,
car les noms mêmes des fleuves étaient chargés de mystère,
le fleuve jaune, l’Ienissei , le Tigre et
l’Euphrate, le Bramapoutre, le Congo, le
Darling…les dessins qui représentaient les fleuves
sur les cartes semblaient un peu étranges, le moins que
l’on puisse dire c’est qu’ils ne
connaissaient pas la ligne droite et c’est tant
mieux ! Des courbes en tous sens, des passages en
force dans les montagnes, ou des arrivées dans la mer très
paresseuse avec des deltas qui transforment la côte en
dentelles. Un nombre incroyable de combinaisons pour des
fleuves tous différents les uns des autres. Après, le jeu
était de trouver des images fixes ou animées pour découvrir
une son aspect réel, il n’y avait pas grand chose et
donc tout était bon, les reportages photos dans Paris
Match, mais aussi de façon paradoxale dans les films
hollywoodiens. Les westerns permettaient de découvrir le
Rio Grande, frontière naturelle avec le Mexique,
Les
Trois Lanciers du Bengale d’Henry
Hathaway permettait de découvrir l’Inde de façon
fantasmée, la
Forêt Interdite de
Nicholas Ray ou la Rivière
Sans Retour d’
Otto Preminger, le
Fleuve de Jean
Renoir… bien plus tard, trop tard il y a eu
Dersou
Ouzala d’
Akira Kurosawa. C’était en partie tout ce que
j’avais pu rêver en lisant sur la carte le nom des
fleuves sibériens et en particulier
l’Ienissei…
Ce travail photographique prend ses racines dans ces
souvenirs d’enfance. Lors que le projet est apparu
j’ai tout de suite su que ce ne serait pas un
reportage sur les rives de la rivière Somme. Il fallait
retrouver du mystère, de la magie et traiter de fleuves
imaginaires sobrement avec peu d’éléments. Seule, une
vue d’en haut permettait de découvrir des rythmes et
des courbes pleins de majesté et d’émotion. Un
travail plus proche de Georges Méliès que d’Arthus
Bertrand…
Irrawady / Maringoza
Toungouska / Volturno
Waitaki
Ce
travail photographie à été réalisé dans le cadre
"d'Invitation d'Artistes" à l'initiative du Conseil
Régional de Picardie.C'est une collaboration entre Le
Collectif du Marronnier et le Dortmunder Gruppe. Les
photographies ont été exposées sur les berges de la Somme à
Long.
http://www.michel-gombart.com/page154/page301/page301.html